Parapharmacie

ANTIVITAMINE K (AVK) : classification, indications, contre-indications

La fibrillation auriculaire (ou fibrillation atriale) est une maladie cardiaque qui se caractérise par une arythmie importante. Elle concerne plus de 15 % de la population de plus de 75 ans et constitue un facteur de risque majeur de l’accident vasculaire cérébrale. En milieu clinique, son diagnostic est facile et repose sur différents examens. Par exemple, l’électrocardiogramme et l’échographie cardiaque.

La prise en charge de la fibrillation auriculaire consiste généralement en une héparinothérapie qui est relayée par une médication à base d’antivitamines K. L’héparine est administrée systématiquement au patient dès lors que le diagnostic de la FA est posé. En revanche, la médication à base d’antivitamines K est non systématique et dépend du score de CHADS. Elle peut selon les circonstances être remplacée par un autre traitement médicamenteux. Voici ici l’essentiel sur les antivitamines K et le traitement de la fibrillation auriculaire.

Antivitamine K : présentation

Une antivitamine K est un médicament appartenant à la famille des anticoagulants oraux indirects. Elle est disponible en différentes doses. Dans les officines pharmaceutiques, on la retrouve principalement sous la forme de comprimés divisibles. Son administration est généralement faite par voie orale et elle a une demi-vie moyenne estimée à 30 heures.

À l’instar de tout anticoagulant, l’activité de l’antivitamine K va consister en une inhibition de la coagulation sanguine. En effet, une fois administrée, l’antivitamine K va s’opposer au niveau du foie à la synthèse et à l’activité des facteurs de coagulations médiés par la vitamine K, à savoir :

  • Le facteur de coagulation II ;
  • Le facteur de coagulation VII ;
  • Le facteur de coagulation IX ;
  • Le facteur de coagulation X ;
  • La protéine C ;
  • La protéine S.

Après la prise des premières doses d’antivitamines K, tous les facteurs de coagulations dépendants de la vitamine K ne sont pas immédiatement inhibés. Ceux ayant une demi-vie supérieure à celle de l’antivitamine K sont habituellement inhibés des heures voire des jours après l’inhibition de la synthèse des autres facteurs. Par conséquent, l’effet anticoagulant des antivitamines K n’est souvent perceptible qu’au bout de plusieurs jours de traitements.

Au vu de cela, les antivitamines K ne sont pas destinées à être utilisées dans les situations urgentes. La plupart du temps, elles sont prescrites en relai à un autre traitement à effet anticoagulant. Il est à noter, par ailleurs, que les antivitamines K font l’objet d’une grande variabilité de réponses en raison de leurs caractéristiques pharmacocinétiques et pharmacodynamiques.

Sur le plan pharmacocinétique, les antivitamines K se fixent principalement aux protéines plasmatiques et ne sont métabolisées qu’en présence du CYP450. Pour cela, elles interagissent avec beaucoup de médicaments et même avec certaines substances alimentaires. Leur activité est alors susceptible d’être perturbée et un risque important de variation de réponses est observé.

D’un point de vue pharmacodynamique, les réponses à un traitement à base d’AVK sont influencées par divers paramètres notamment les apports exogènes et endogènes de vitamine K, le taux de synthèse des facteurs de coagulations médiés par la vitamine K et les différences génétiques. Ces paramètres font que le traitement avec une antivitamine K est parfois difficile à équilibrer.

Antivitamine K : classes

ANTIVITAMINE K (AVK)

On distingue à ce jour deux différentes classes d’antivitamines K. Il s’agit des antivitamines K dérivées de la coumarine et des antivitamines K dérivées de l’indanedione. Les antivitamines K dérivées de la coumarine comprennent la warfarine (Coumadine®) et l’acénocoumarol (Sintrom® et Minisintrom®) et leur substance active est la coumarine. Le principal représentant de la deuxième classe d’antivitamines K, dont le principe actif est l’indanedione est la fluindione (Previscan®).

La warfarine est l’antivitamine K la plus utilisée de toutes les classes disponibles. Elle représente d’ailleurs la seule antivitamine K de référence sur le plan international. En effet, l’ensemble des essais cliniques et de recherches portant sur les traitements à base d’AVK ont été effectués seulement avec elle.

Antivitamine K : indication dans le traitement de la fibrillation auriculaire

Dans le traitement de la fibrillation auriculaire, l’antivitamine K est prescrite aux patients présentant un risque important de faire un accident vasculaire cérébrale (AVC). Elle est la composante principale du traitement antithrombotique dont le but est de diminuer le risque d’accidents thromboemboliques et principalement le risque d’AVC.

Généralement, dans le traitement antithrombotique d’une fibrillation auriculaire, les antivitamines K sont administrées en absence de contre-indications lorsque le score de CHADS est supérieur à deux. Pour un score de CHADS inférieur à un, la conduite à tenir est toute autre et l’utilisation d’une antivitamine K est proscrite.

Score de CHADS : méthode de calcul

Le score de CHADS est un score utilisé pour estimer le risque pour un patient souffrant d’une fibrillation auriculaire non valvulaire de faire un accident vasculaire cérébral. Il est calculé sur la base des facteurs cliniques de risque non échographique majeur associé à la survenue d’un AVC qui regroupe :

  • La fraction d’éjection ventriculaire gauche ;
  • L’hypertension artérielle (HTA) ;
  • L’âge ;
  • Le diabète ;
  • Les antécédents d’accident vasculaire cérébral.

Le calcul du score de CHADS se fait en deux étapes simples. Dans un premier temps, pour chaque facteur de risque cité, un point spécifié est attribué par le médecin traitant au regard des caractéristiques cliniques du patient. Il varie de 0 à 2 et dépend des normes de cotation définies pour l’attribution de points dans le système de calcul de score CHADS. Ces dernières sont disponibles dans la rubrique ci-dessous.

La deuxième étape du calcul du score de CHADS consiste en une addition des points attribués pour chaque paramètre. Le total obtenu correspond au score de CHADS. Il fluctue de 0 à 6 et permet d’apprécier objectivement le risque d’un accident vasculaire cérébral après une fibrillation auriculaire non valvulaire.

Score de CHADS : normes de cotation

Pour chaque paramètre utilisé pour le calcul du score de CHAS, voici les normes de cotation définies.

Fraction d’éjection ventriculaire gauche

Dans le système de CHADS, pour le paramètre « fraction d’éjection ventriculaire gauche » le point attribuable est compris entre 0 et 1. Une note de 0 est attribuée au patient lorsque la fraction d’éjection relevée est supérieure à 35 %. Dans le cas contraire, c’est-à-dire lorsque la fraction d’éjection relevée est inférieure à 35 %, on lui attribue une note de 1. Une faible fraction d’éjection ventriculaire est généralement un signe d’insuffisance cardiaque ou de dysfonction ventriculaire.

Hypertension artérielle (HTA)

À l’instar du paramètre précédent, pour le paramètre « hypertension artérielle » du système de CHADS le maximum de point attribuable est 1. Une note de 0 est attribuée au malade lorsqu’il présente une pression artérielle systolique (PAS) inférieure à 160 mmHg. Cela implique qu’il n’est pas hypertendu. Par contre, s’il présente une pression artérielle systolique supérieure à 160 mmHg, cela suppose qu’il est hypertendu. Une note de 1 lui est alors attribuée.

Âge

Le paramètre « âge » du système de calcul de score de CHADS est noté sur 1. Une note de 0 est attribuée au patient souffrant d’une fibrillation auriculaire d’âge inférieure à 75. À l’inverse, une note de 1 est attribuée au patient souffrant d’une fibrillation auriculaire dont l’âge est supérieur à 75. En effet, après une fibrillation auriculaire, le risque d’accident vasculaire cérébral est important chez les personnes âgées de plus de 75 ans.

Diabète

Dans le système de calcul de score de CHADS, le paramètre « diabète » est également noté sur 1 point. Une note de 0 est attribuée aux patients atteints de fibrillation auriculaire qui ne souffrent pas de diabète. À l’opposé, une note de 1 est attribuée aux patients atteints de fibrillation auriculaire qui présentent une comorbidité comme le diabète.

Il est à noter ici que l’attribution des points n’est pas fonction du type de diabète ou encore de ses caractéristiques (ancienneté, équilibre). Ainsi, même si le diabète du patient considéré a pu être contrôlé, une note égale à 1 lui est également attribuée. On entend, par ailleurs, par un diabète contrôlé, un diabète qui a pu être équilibré par un traitement médical.

Antécédents d’accident vasculaire cérébral

Ce dernier paramètre du système de calcul de score de CHADS est la plus cotée de toutes. Elle est notée sur deux points. Une note de 0 est attribuée au patient lorsqu’il ne présente aucun antécédent d’accident vasculaire cérébral. En revanche, une note de 2 lui est attribuée s’il présente un ou plusieurs antécédents d’accident vasculaire cérébral.

Pour rappel, les principaux facteurs de risque de l’accident vasculaire cérébral sont :

  • L’accident ischémique transitoire ;
  • L’embolie pulmonaire ;
  • L’accident vasculaire cérébral mineur.

Outre ces facteurs de risque, les antécédents familiaux qui sont souvent mis de côté constituent aussi un facteur de risque non négligeable de l’accident vasculaire cérébral.

Score de CHADS : interprétation

Après une fibrillation auriculaire, en absence d’un traitement antithrombotique, le risque de survenue d’un AVC par année en fonction du score de CHADS obtenu est précisé dans le tableau suivant.

Score de CHADS Risque de survenue d’un AVC
0/6 1,9 % par année
1/6 2,8 % par année
2/6 4 % par année
3/6 5,9 % par année
4/6 8,5 % par année
5/6 12,5 % par année
6/6 18,2 % par année

Antivitamine K : mode d’administration dans le traitement de la fibrillation auriculaire

ANTIVITAMINE K (AVK)

Dans le traitement de la fibrillation auriculaire non valvulaire avec un score de CHADS supérieur à 2, l’antivitamine K est utilisée en complément de l’héparine. Immédiatement après, le diagnostic de la fibrillation auriculaire est posé et le patient est systématiquement mis sous la calciparine. Ensuite, quelque temps après l’utilisation de la calciparine, une antivitamine K est intégrée au traitement par chevauchement.

Environ 36 heures après l’administration de l’antivitamine K, un premier contrôle d’INR est fait. Il est réitéré toutes les 48 heures, soit chaque deux jours, jusqu’à ce que le traitement soit entièrement équilibré. En général, après 2 ou 3 contrôles d’INR réalisées en zone thérapeutique, l’administration de la calciparine est stoppée.

Contrôle d’INR : intérêt

Le contrôle d’INR (ou International Normalized Ratio) mesure sous des conditions spécifiques le temps précis de coagulation d’un patient traité avec une antivitamine K et le compare au temps de coagulation d’un patient ne recevant pas d’antivitamine K. En principe, chez une personne ne prenant aucune antivitamine K ou un quelconque autre traitement anticoagulant, l’INR moyenne est égale à 1. Il est rare qu’il atteigne 2. Chez un patient prenant une antivitamine K, par contre, il est toujours supérieur à 1. En règle générale, il augmente avec le temps de coagulation.

Il est important pour le médecin traitant de le contrôler afin d’identifier l’INR cible. Il s’agit de la valeur de l’INR pour laquelle le temps de coagulation permet un traitement efficace. Bien souvent, il est compris entre 2 et 3. Dans le traitement de la fibrillation auriculaire, après l’administration d’une antivitamine K, lors des contrôles d’INR un réajustement doit être fait dans les circonstances suivantes :

  • INR obtenue inférieure à 2, en général cela veut signifier que la dose d’antivitamine K administrée est faible et doit être augmentée ;
  • INR obtenue supérieure à 3, en général cela veut signifier que la dose d’antivitamine K administrée est forte et doit être diminuée.

Chez certains patients il n’y a qu’après une INR supérieure à 3 que le traitement est efficace. Dans ce cas, seul le médecin traitant pourra décider s’il faut réduire la dose d’antivitamine K administrée au patient. Quoiqu’il en soit, il est important de souligner qu’une INR supérieure à 5 est généralement associée un risque hémorragique important.

Antivitamine K : durée du traitement

Pour la prise en charge d’une fibrillation auriculaire non valvulaire avec un score de CHADS supérieur à 2, la durée du traitement antithrombotique n’est pas figée. Elle dépend de plusieurs paramètres, dont le plus important est la correction de la fibrillation auriculaire.

La prise d’antivitamines K doit continuer aussi longtemps que durent les symptômes de la fibrillation auriculaire. Cependant, si la fibrillation auriculaire non vulvaire a pu être contrôlée, l’administration d’antivitamines K peut être arrêtée un mois environ après la cardioversion.

Antivitamine K : contre-indications

À l’instar de tout produit pharmaceutique, les antivitamines K font l’objet de nombreuses contre-indications. Ainsi, elles ne doivent pas être utilisées dans les circonstances suivantes :

  • La grossesse ou l’allaitement ;
  • Une allergie aux substances actives des antivitamines K ou à l’un des ingrédients qui entrent dans sa composition ;
  • La présence d’un ulcère gastroduodénal évolutif ;
  • Une intervention chirurgicale ;
  • Une insuffisance rénale ;
  • Une insuffisance hépatique.

Le patient a obligation d’informer le médecin traitant lorsqu’il présente une contre-indication aux antivitamines K. Autrement dit, il s’expose à des complications graves. En situation de contre-indications, les antivitamines K sont généralement remplacées par d’autres médicaments.

 

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