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ANGIOGENÈSE : PERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES POUR LES CANCERS ET AUTRES PATHOLOGIES

Pour que l’organisme humain soit alimenté en sang, oxygène et en nutriments, il a besoin d’un réseau vasculaire. L’un des mécanismes intervenant dans le développement de ces artères est l’angiogenèse. Elle est définie comme étant la formation de nouveaux vaisseaux à partir d’un réseau vasculaire déjà existant.

Il s’agit d’un phénomène qui n’intervient pas à l’âge adulte, sauf en cas de grossesse, durant un processus de cicatrisation ou lors du cycle menstruel. L’angiogenèse intervient aussi dans la progression de nombreuses maladies graves. Dans ce contexte pathologique, il s’avère que le mécanisme possède des failles qui peuvent être employées pour un véritable traitement de cancers, tumeurs et affections auto-immunes. Voici donc les découvertes faites dans ce cadre.

ANGIOGENÈSE TUMORALE : Physiopathologie

L’angiogenèse est impliquée dans le développement de nombreuses pathologies. Il s’agit par exemple de maladies :

  • Cutanées comme le psoriasis ;
  • Articulaires comme l’ostéomyélite et l’arthrite ;
  • Pulmonaires telles que l’asthme ;
  • Nerveuses comme la maladie d’Alzheimer.

Pour toutes ces pathologies concernées, le mécanisme de croissance du germe est le même. Toutefois, il diffère de ce qui produit lors d’une angiogenèse normale.

En effet, dans ce contexte, la stabilité du réseau vasculaire est assurée par un équilibre entre des facteurs anti-angiogènes et pro-angiogènes. Celui-ci est rompu en présence d’une affection. On parle alors de switch angiogénique.

Le mécanisme de l’angiogenèse tumorale

La commutation angiogénique également qualifiée de switch angiogénique constitue le point de départ d’une angiogenèse tumorale. C’est ce mécanisme qui va favoriser le développement d’une tumeur.

En effet, lorsqu’une tumeur survient, elle reçoit les nutriments et l’oxygène grâce aux artères normales présentes dans la zone où elle se situe, et ce, tant qu’elle n’a pas dépassé le diamètre de 2 mm. Cela signifie donc que si la tumeur doit se développer au-delà de cette taille, elle va devoir mettre en place son propre réseau vasculaire.

C’est à partir de cet instant que l’angiogenèse tumorale est nécessaire. Celle-ci est certes provoquée par le switch angiogénique. Il faut préciser qu’elle est favorisée par l’effet des cellules pro-angiogéniques qui contrebalance celui des molécules anti-angiogéniques. Ces dernières se retrouvent donc en un nombre plus réduit.

La quantité des cellules pro-angiogéniqies étant plus élevée, ces dernières sont alors plus aptes à conférer le pouvoir aux cellules de la tumeur de former un nouveau réseau vasculaire. Une fois que celui-ci est mis en place, la tumeur est plus facilement en mesure d’envahir sa zone d’implantation et si possible évoluer hors de celle-ci.

Angiogenèse perspectives : L’anormalité des vaisseaux tumoraux

Bien que le principe de néovascularisation des cellules tumorales soit identique à celui des cellules normales, il faut avouer que le réseau vasculaire obtenu dans le premier cas est totalement différent. En effet, dans le cas d’une angiogenèse tumorale, les nouveaux vaisseaux créés possèdent des caractéristiques anormales. Celles-ci se traduisent notamment par une :

  • Discontinuité, une irrégularité voire une absence de la membrane basale ;
  • Inégalité du diamètre vasculaire ;
  • Faiblesse du débit sanguin ;
  • Irrégularité des arborisations ;
  • Mauvaise organisation du réseau formé par les péricytes ;
  • Anormalité ou absence des vaisseaux lymphatiques ;
  • Perméabilité ou fragilité des vaisseaux ;
  • Mauvaise régulation de la pression au sein des vaisseaux.

Outre cela, les cellules endothéliales de ces tumeurs sont constamment en train de se renouveler et leur densité vasculaire est faible.

Quelles sont les possibilités thérapeutiques ?

Le réseau vasculaire d’une tumeur est de mauvaise qualité. Cet état ne l’empêche pas d’approvisionner la tumeur en nutriments et en oxygène. Toutefois, ce qui réjouit, c’est que cette structure anormale constitue une piste déjà en exploration pour la découverte de stratégies thérapeutiques fiables. Ces perspectives sont au nombre de trois.

L’inhibition de la croissance des néovaisseaux

Compte tenu du fait que la croissance d’une tumeur repose essentiellement sur celle de ses vaisseaux, des recherches ont permis de découvrir que la prolifération de la tumeur peut être empêchée en inhibant ce développement. Cela sera tout simplement possible grâce aux anti-angiogéniques dont le rôle va consister à s’attaquer au VEGF.

Pour information, c’est grâce à la sécrétion de cet agent que le réseau vasculaire tumoral parvient à survivre malgré son état dégradé. Si la production du VEGF subit donc un dysfonctionnement, il deviendra difficile aux cellules tumorales de continuer à se proliférer.

Les résultats de cette piste restent une garantie, car contrairement aux produits anti-VEGF comme le bévacuzimab (qui ont une efficacité relative), les anti-angiogéniques vont exclusivement cibler le VEGF. D’ailleurs, cette stratégie a déjà été expérimentée dans diverses situations et elle a fait l’objet d’une efficacité avérée. Il urge alors de mieux l’exploiter.

Les limites de la perspective

Malgré sa possible efficacité, la stratégie de l’inhibition de la croissance des vaisseaux tumoraux possède encore beaucoup de secrets, notamment en ce qui concerne :

  • Ses effets sur le long terme ;
  • Sa durée de traitement ;
  • Ses combinaisons ;
  • Sa dose ;
  • Son bénéfice réel pour le patient.

De toutes les questions sans réponses qui tournent autour de cette piste de traitement, celle qui intéresse le plus a rapport avec son régime d’administration.

À ce propos, les scientifiques se demandent si l’efficacité ne serait-elle pas meilleure si l’on suivait comme indiqué par Jain dans son concept sur la fenêtre de normalisation une technique autre que celle qui consiste à administrer concomitamment une chimiothérapie de référence et un anti-angiogénique.

La destruction des néovaisseaux tumoraux

La seconde approche thérapeutique permettant d’interrompre la prolifération des cellules tumorales et ainsi traiter efficacement les cancers est de détruire les nouveaux vaisseaux tumoraux. Pour y parvenir, il suffit de miser sur l’action des Vascular Disrupting Agents (VDA).

Il s’agit d’un ensemble de deux molécules (analogues d’Aavonoïdes et agents de liaison à la tubuline) qui sont capables de détruire les péricytes des vaisseaux et les cellules endothéliales immatures.

Particulièrement, à propos de ces dernières, les recherches font comprendre que leur destruction peut également provoquer une dégradation au niveau des cellules endothéliales normales. Ce qui peut être source de dégâts sur les plans neurologique et cardiaque.

Les défis de la piste thérapeutique

Des études sont en cours pour évaluer le facteur bénéfice/risque afin de savoir si cette piste des VDA est envisageable. Garantir donc que l’action de cette classe de produits sera bientôt une source de traitement est chose difficile à dire, surtout qu’il existe de nombreuses interrogations autour de cette perspective.

Celles-ci sont de même nature que les questions intervenues au niveau de l’inhibition du VEGF. De plus, rien n’est encore sûr en ce qui concerne l’efficacité de cette stratégie en monothérapie. Cette incertitude provient du fait que la destruction des cellules endothéliales tumorales par les VDA ne s’effectue qu’au centre de la tumeur.

La couronne du cancer reste intacte et peut si possible continuer à se développer. Avec ce constat, il s’impose d’associer la chimiothérapie à la technique thérapeutique. D’ailleurs, cette combinaison a déjà été expérimentée et les résultats sont prometteurs.

Ici encore, il y a une énigme à résoudre. Les deux traitements doivent-ils être administrés de façon décalée ou simultanée ? Cela reste à préciser.

Rendre plus anormaux les néovaisseaux de la tumeur

Il est vrai que malgré son mauvais état, le réseau vasculaire tumoral fonctionne comme il se doit. Cependant, il s’avère que si la dégradation de ces artères est plus poussée, la tumeur ne sera plus en mesure de progresser. C’est le principe de la troisième perspective.

Son objectif consiste en réalité à rendre plus anormaux les néovaisseaux tumoraux. Cela va se faire grâce au blocage du D114. Il s’agit d’une protéine produite par le VEGF. La découverte de cette stratégie est récente et encore en étude.

Les résultats des quelques essais cliniques déjà effectués sur des animaux et reposants sur l’usage d’anticorps anti-D114 constituent une lueur d’espoir. Comme dans les deux autres cas, la piste du blocage de D114 soulève aussi un problème. Celui-ci concerne son niveau de tolérance par un malade cancéreux.

Par ailleurs, il y a une question qu’il est important de poser : laquelle des trois perspectives est la meilleure ? À cette interrogation, on peut répondre qu’il n’y a pas de choix à faire. Il faut plutôt concentrer les forces des trois stratégies thérapeutiques. Pour plus d’efficacité, il serait mieux de ne pas les administrer simultanément.

Angiogenèse perspective : Le ciblage du VEGF comme piste de traitement

ANGIOGENÈSE

Parmi les différents facteurs pro-angiogéniques qui déclenchent le switch angiogénique et par conséquent l’angiogenèse tumorale figure le VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor). Sécrété par les cellules en hypoxie, il s’agit d’un agent mitogène présent aussi bien au niveau des cellules endothéliales normales que pathologiques.

Il appartient à une famille de sept polypeptides à savoir le :

  • VEGF-A encore dénommé VEGF ;
  • VEGF-B ;
  • VEGF-C ;
  • VEGF-D ;
  • VEGF-E ;
  • VEGF-F ;

Le VEGF n’est pas qu’impliqué dans la naissance de l’angiogenèse tumorale. Il intervient aussi dans la continuité de ce mécanisme. En effet, cet élément angiogénique favorise :

  • La vascularisation tumorale ;
  • La prolifération et la survie des cellules endothéliales ;
  • La perméabilité du réseau vasculaire

Des mécanismes secondaires exigent également la présence du VEGF. Il s’agit de l’apport de calcium au sein des vaisseaux, de la maturation des cellules dendritiques et du chimiotactisme des monocytes.

VEGF : Quelles sont les pistes thérapeutiques à envisager ?

Si le VEGF constitue un élément clé dans la naissance et surtout la survie des cellules tumorales, il représente par la même occasion un acteur majeur dans le développement des tumeurs. Cette découverte est une grande avancée pour la communauté médicale, car elle constitue une porte d’ouverture pour la conception de traitements contre les cancers.

En réalité, la perspective thérapeutique à ce niveau repose sur l’inhibition du VEGF ou à défaut sur le blocage de l’action des récepteurs auxquels il se fixe. Il s’agit donc de concevoir des anti-VEGF. Actuellement, des molécules de ce genre sont en cours de fabrication. Elles possèdent différents procédés d’action et se regroupent en cinq types à savoir les :

  • Thérapies anti-ARN du VEGF ;
  • Inhibiteurs de tyrosine kinase du récepteur du VEGF ;
  • Anticorps monoclonaux dirigés contre le VEGF ;
  • Récepteurs hybrides circulants du VEGF-trap ;
  • Anticorps monoclonaux dirigés contre les récepteurs du VEGF.

Par ailleurs, il est nécessaire de comprendre que les anti-VEGF ne guérissent pas le cancer. Ils ne sont capables que d’empêcher son évolution. Pour un objectif d’éradication, l’association d’une autre forme de traitement comme la chimiothérapie est requise.

Angiogenèse perspective : L’influence de l’hypoxie

Lorsqu’on bouche les ouvertures d’un vaisseau, l’artère qui se trouve en avant de ce dernier se retrouve en manque d’oxygène. On parle de stress hypoxique. Ce mécanisme conduit à la sécrétion du HIF (Hypoxia Inductible Factor). Il s’agit d’un facteur de transcription.

Son rôle est de favoriser la survie des cellules en milieu hypoxique. Pour remplir cette mission, le facteur HIF se fixe au HRE. Cette liaison entraîne divers mécanismes physiques comme :

  • L’hyperventilation ;
  • La vasodilatation ;
  • L’accélération du rythme cardiaque.

La liaison entre les deux facteurs est aussi à la base de l’hyperstimulation de plusieurs facteurs pro-angiogéniques dont le VEGF. Pourtant, cet oncogène participe énormément à la survie des cellules tumorales. Il est possible d’exploiter cette voie pour le traitement de cancers.

Le principe consistera d’abord à bloquer le récepteur du facteur HIF, c’est-à-dire le HEF. Ensuite, il faudra mettre la région tumorale dans une situation hypoxique. Si dans cette condition, les cellules cancérigènes tirent leur énergie de la glycolyse alors que celle-ci se retrouve inhibée, elles s’asphyxieront.

Angiogenèse perspectives : les autres pistes thérapeutiques

Parmi les différentes formes de VEGF, il y a une qui se manifeste uniquement dans les conditions pathologiques. Il s’agit du PIGF. Cette découverte est une piste favorable pour le traitement de plusieurs affections dans lesquelles l’angiogenèse est impliquée.

En effet, si la pathologie est présente et que cet agent une fois sécrété par les cellules voit sa concentration réduite, cela peut contribuer à la régression de la tumeur. Outre cela, il est possible d’explorer la stratégie thérapeutique relative à la voie Notch/D114.

Lorsque cette dernière est stimulée, le réseau vasculaire tumoral se normalise, favorisant ainsi le développement de la pathologie. La tumeur régresse en situation inverse. C’est-à-dire qu’il faudra réduire l’action de la voie Notch. Cela va davantage dégrader l’état des vaisseaux tumoraux ainsi conduire à la mort progressive du cancer.

Un nouveau mode d’administration de la chimiothérapie

Par ailleurs, une autre perspective d’angiogenèse connaît déjà un franc succès dans le soulagement du cancer de sein. Elle constitue également une lueur d’espoir dans le traitement des autres tumeurs métastatiques. Cette stratégie repose sur le mode d’administration de la chimiothérapie.

Classiquement, pour soigner un cancer, cette technique exige d’administrer au patient le dosage le plus élevé possible du médicament puis d’effectuer par la suite une pause thérapeutique. Généralement, au cours de cette période de latence, la tumeur a tendance à se multiplier, réduisant ainsi l’efficacité du traitement.

Avec la nouvelle perspective thérapeutique en vue, un changement est à venir. Concrètement, il va plutôt s’agir ici d’administrer au patient une faible dose du produit. Cela va se faire de manière continue, mais sur une longue période. Ainsi, il n’y aura pas de temps de latence et la tumeur ne pourra donc plus profiter de celui-ci pour croître.

 

 

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