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Aménorrhée primaire : étiologies, sémiologie, diagnostic, traitement

L’aménorrhée primaire est un trouble qui se caractérise par l’absence de menstruations (ou de règles) chez une femme qui par le passé, n’a jamais été réglée. Moins fréquente que l’aménorrhée secondaire, elle concerne plus de 3 % de la population des adolescentes. Les raisons de sa survenue sont multiples et comprennent principalement un dysfonctionnement de l’axe hypothalamo-hypophysaire.

Le diagnostic de l’aménorrhée primaire repose sur un examen clinique, une échographie pelvienne et des analyses biochimiques. La prise en charge dépend de l’étiologie et consiste généralement en une médication. Les complications de l’aménorrhée primaire sont nombreuses et peuvent entraîner des répercussions négatives sur la fertilité du malade. Voici l’essentiel sur l’aménorrhée primaire.

Aménorrhée primaire : étiologies

Les étiologies d’une aménorrhée primaire sont nombreuses. En fonction de l’organe atteint, elles peuvent être réparties en plusieurs groupes. Ainsi, on distingue :

  • Les étiologies hypothalamo-hypophysaires ;
  • Les étiologies ovariennes ;
  • Les étiologies utéro-vaginales.

Hormis les groupes d’étiologies susmentionnés, d’autres étiologies peu communes peuvent justifier la survenue d’une aménorrhée primaire.

1. Étiologies hypothalamo-hypophysaires de l’aménorrhée primaire

Les étiologies hypothalamo-hypophysaires de l’aménorrhée primaire sont les plus fréquentes. Elles sont liées à un problème de l’axe hypothalamo-hypophysaire et comprennent :

  • Une insuffisance des hormones gonadotropes ;
  • Une anorexie mentale ;
  • Un syndrome olfacto génital ;
  • Des lésions hypophysaires ;
  • Une hyperprolactinémie.

Il est à noter, par ailleurs, que l’hypothalamus et l’hypophyse sont des composantes du cerveau qui interviennent dans la modulation des fonctions reproductives.

Insuffisance des hormones gonadotropes

Les hormones gonadotropes (ou gonadotrophines) sont des glycoprotéines complexes indispensables à l’activité des ovaires et des testicules. Elles regroupent plusieurs hormones, dont les plus importantes sont la FSH (hormone folliculo-stimulante) et la LH (hormone lutéinisante). Elles sont synthétisées par l’hypophyse antérieure en présence de la GnRH qui est une gonadolibérine hypothalamique.

En général, l’insuffisance d’hormones gonadotropes se traduit par le défaut de sécrétion de la FSH et de la LH dans l’organisme. Bien souvent, elle est présente depuis la naissance et se traduit par un ensemble de symptômes comprenant une aménorrhée primaire. Chez une femme souffrant de l’insuffisance d’hormones gonadotropes, les ovaires ne remplissent pas correctement leurs fonctions.

Anorexie mentale

À l’instar de la boulimie, l’anorexie mentale est un trouble du comportement alimentaire (TCA) fréquent chez les adolescents. Elle se caractérise par une préoccupation excessive de l’apparence qui se traduit par un contrôle permanent et exagéré de l’alimentation. En effet, la personne souffrant d’anorexie mentale dans le souci de ne pas prendre du poids limite drastiquement ses apports alimentaires. Elle se retrouve donc avec un faible poids et un indice de masse corporelle extrêmement bas.

Les étiologies de l’anorexie mentale sont complexes et continuent toujours d’être étudiées. Cependant, la maladie résulte la plupart du temps d’une dysmorphophobie, d’une atteinte psychique ou d’une atteinte neurologique.

Dans l’anorexie mentale, les fonctions physiologiques de l’organisme sont affectées en raison du déficit énergétique chronique qui est observé. Par conséquent, l’activité de l’axe hypothalamo-hypophysaire est perturbée. La sécrétion des gonadotrophines connaît alors une baisse importante. C’est ainsi qu’apparaissent les maladies telles que l’aménorrhée primaire.

Syndrome olfacto génital

Le syndrome olfacto génital encore appelé syndrome de Kallmann est une maladie rare qui se caractérise par un hypogonadisme et une baisse de l’odorat. Il associe une baisse de la sécrétion de la GnRH et un défaut important de synthèse des hormones gonadotropes à l’origine de l’aménorrhée primaire. En général, la maladie résulte d’un problème localisé de développement embryonnaire dont la principale cause est génétique. Elle est présente depuis la naissance et évolue de façon insidieuse. Dans la plupart des cas, elle est diagnostiquée à l’adolescence en présence des signes cliniques de retard pubertaire.

Lésions hypophysaires

Les lésions hypophysaires correspondent à une altération progressive des tissus de l’hypophyse. Elles sont de différentes formes et ont en commun une modification de l’activité de l’hypophyse. Elles entraînent, dans la majorité des cas, un défaut de synthèse de gonadotrophines qui se manifeste entre autres par une aménorrhée primaire.

Hyperprolactinémie

L’hyperprolactinémie est une maladie hormonale qui se traduit par une hausse importante du taux de prolactine sanguin. Chez l’adolescente, elle est définie comme une augmentation de la prolactine au-delà du seuil de 25 ng/ml. Elle concerne principalement les femmes, mais les hommes peuvent aussi en souffrir.

La prolactine est une hormone impliquée dans la production lactée et la croissance des seins pendant la grossesse. Par conséquent, il est normal qu’elle connaisse une hausse en cas de grossesse et d’allaitement. Cependant, en dehors de ces situations physiologiques, sa hausse peut être préjudiciable pour la santé. Dans près de 80 % des cas d’aménorrhée primaire, par exemple, une hyperprolactinémie est observée.

2. Étiologies ovariennes de l’aménorrhée primaire

Aménorrhée primaire

Les étiologies ovariennes constituent avec les étiologies hypothalamo-hypophysaires les étiologies les plus fréquentes d’une aménorrhée primaire. Elles découlent d’un dysfonctionnement des ovaires et regroupent les pathologies telles que le syndrome de TURNER, la mosaïque de TURNER et le XO-XY mosaïque.

Syndrome de TURNER

Le syndrome de TURNER est une malformation génétique qui se caractérise par l’absence partielle ou totale d’un chromosome sexuel du caryotype X.  Il ne concerne que les femmes et se traduit par un retard important de croissance et des problèmes sexuels tels qu’une aménorrhée primaire. Outre les problèmes sexuels, il est associé à un risque important de maladies rénales, de maladies endocriniennes et de malformations congénitales.

Mosaïque de TURNER

La mosaïque de TURNER est une forme particulière du syndrome de TURNER. Elle se définit par la présence de deux chromosomes sexuels sur certaines cellules (46XX) et l’absence d’un chromosome sexuel sur d’autres (45 X). Tout comme le syndrome de TURNER, elle est d’origine génétique et concerne principalement les femmes. Ces manifestations cliniques comprennent les affections sexuelles telles qu’une aménorrhée primaire et un retard pubertaire.

XO-XY mosaïque

Le mosaïcisme 45, X/46, XY (mosaïcisme X0/XY ou XO-XY mosaïque) est une maladie chromosomique rare qui touche les femmes et les hommes. Il s’agit d’une mutation du gène qui code le développement sexuel en réponse à une aneuploïdie majeure des chromosomes sexuels. Il entraîne d’importantes modifications sur le caryotype du malade et peut favoriser de nombreuses maladies. Notamment, une aménorrhée primaire et une gonadoblastome.

3. Étiologies utéro-vaginales de l’aménorrhée primaire

Le syndrome de ROKITANSKI (aplasie utéro-vaginale) est la seule étiologie utéro-vaginale de l’aménorrhée primaire. Répertorié parmi les maladies les plus rares, il affecte moins de 1 % des enfants de sexe féminin. Il est généralement diagnostiqué à l’adolescence et associe une absence totale d’utérus et une absence partielle du vagin. Les étiologies précises du syndrome de ROKITANSKI restent encore méconnues à ce jour. Cependant, les recherches les plus récentes suggèrent que le syndrome résulte d’une modification génétique grave.

4. Autres étiologies de l’aménorrhée primaire

L’autre étiologie de l’aménorrhée primaire est la surrénalienne. Également appelée insuffisance surrénale, la surrénalienne correspond à un syndrome hormonal caractérisé par un défaut de synthèse de corticostéroïdes dans les glandes surrénales. Elle est due à un dysfonctionnement des surrénales et peut prendre différentes formes. Ainsi, on distingue : l’insuffisance surrénalienne chronique, l’insuffisance surrénale chronique primaire (ou maladie d’Addison) et l’insuffisance surrénale corticotrope. Toutes les formes d’insuffisances surrénales peuvent créer une aménorrhée primaire. Cependant, l’insuffisance surrénale chronique primaire est la principale surrénalienne qu’on associe à la survenue de l’aménorrhée primaire.

Excepté la surrénalienne, d’autres causes non immédiates concourent à la survenue d’une aménorrhée primaire. Elles sont considérées comme des facteurs de risque de la maladie et comprennent :

  • Une perte pondérale importante ;
  • Un stress chronique (en réponse à une situation difficile, par exemple un décès ou une séparation)
  • La pratique intense de certaines activités sportives ;
  • Une alimentation déséquilibrée.

Plus rarement, l’utilisation de certains produits pharmaceutiques ou certaines interventions chirurgicales peuvent être favorables à une aménorrhée primaire.

Aménorrhée primaire : sémiologie et âge

Le principal symptôme caractéristique d’une aménorrhée primaire est l’absence de règles chez une femme jamais menstruée. Hormis elle, les autres manifestations cliniques de l’aménorrhée primaire regroupent :

  • Le mal de tête ;
  • Les bouffées de chaleur ;
  • L’absence ou le retard d’apparition des caractères sexuels.

Elles ne sont pas observées systématiquement chez toutes les femmes qui souffrent d’aménorrhée primaire. Il est à noter que l’aménorrhée primaire concerne les adolescentes d’âge supérieur à 16 ans. Ainsi, une absence de règles entre 9 et 15 ans ne traduit pas systématiquement une aménorrhée primaire. Pour que le diagnostic de l’aménorrhée primaire soit confirmé, il faut impérativement que le patient dépasse l’âge de la puberté, c’est-à-dire 16 ans.

Aménorrhée primaire : diagnostic

Le diagnostic de l’aménorrhée primaire repose sur un examen clinique, une échographie pelvienne, des dosages hormonaux et au besoin certains examens complémentaires.

Examen clinique

L’examen clinique

se fait en deux étapes. La première étape consiste en une examination générale du patient. Il permet, pour commencer d’apprécier la croissance staturo-pondérale du patient au travers des paramètres cliniques tels que le poids et la taille. Ensuite, l’examen permet de rechercher les signes d’un morphotype et d’évaluer le stade précis de développement par vérification de la pilosité (axillaire, pubienne) et du volume mammaire. Pour finir, durant l’examen clinique général, le médecin peut aussi voir si le patient présente des signes d’hyperandrogénie ou d’hypercorticisme. Ces données lui permettront de poser un meilleur diagnostic étiologique.

La deuxième étape de l’examen clinique est plus spécifique que la précédente. Il s’agit de l’examen gynécologique. Généralement, il est réalisé par un gynécologue dans le but d’explorer l’appareil reproductif du patient. Il permet d’inspecter la vulve et de relever les problèmes structuraux (taille du clitoris, aspect des lèvres, configuration de l’hymen) dont elle est sujette. En plus, durant l’examen gynécologique grâce au spéculum, le gynécologue vérifie si le patient dispose d’un vagin et d’un col de l’utérus.

Échographie pelvienne

L’échographie pelvienne est un examen radiographique qui vérifie la présence de l’utérus et apprécie ses caractéristiques ainsi que celles des deux ovaires. Elle se fait exclusivement en milieu clinique et suivant des étapes spécifiées. À l’inverse des idées reçues, l’échographie pelvienne est indolore et les ultrasons utilisés ne sont pas préjudiciables pour la santé.

Dosages hormonaux

Pour poser le diagnostic de l’aménorrhée primaire, un bilan hormonal est obligatoire. Il comprend le dosage systématique de plusieurs hormones. À savoir, la FSH, la LH et la prolactine. Un taux élevé de FSH et de LH suggère une atteinte ovarienne tandis que les taux bas de ces mêmes hormones suggèrent une atteinte hypothalamo-hypophysaire.

En fonction des données de l’examen clinique, d’autres dosages peuvent être effectués. Par exemple, la testostérone est dosée en cas de suspicion d’hirsutisme et la TSH est dosée en cas de suspicion de dysthyroïdie.

Examens complémentaires

Les examens complémentaires à réaliser dans le cadre du diagnostic de l’aménorrhée primaire dépendent des résultats des examens précédents. En général, ils comprennent :

  • Une bêta-HCG ;
  • Une courbe ménothermique (nécessaire lorsque le patient présente des caractères sexuels secondaires) ;
  • Une radiographie du squelette (nécessaire lorsque l’âge osseux est requis) ;
  • Une IRM ou un scanner de la selle turcique ;
  • Une cœlioscopie.

Plus rarement, le caryotype du patient est exploré à la recherche d’une mosaïque ou d’un corpuscule de Barr par exemple.

Aménorrhée primaire : traitement

Aménorrhée primaire

Le traitement d’une aménorrhée primaire repose sur plusieurs moyens. Ainsi, on distingue le traitement hormonal, le traitement non hormonal et le traitement chirurgical.

Traitement hormonal

Le traitement hormonal de l’aménorrhée primaire consiste en l’administration par voie orale ou intraveineuse de gonadotrophines au patient. Il est indiqué uniquement lorsqu’une atteinte ovarienne est à l’origine de l’absence des règles et permet l’apparition des caractères sexuels secondaires dans les plus brefs délais. De plus, il améliorerait la fertilité et lutterait contre l’apparition de l’ostéoporose.

Traitement non hormonal

Le traitement non hormonal se traduit par l’administration de produits thérapeutiques autres que les hormones au patient. Il est conduit par des médicaments qui varient en fonction de l’étiologie de l’aménorrhée. Dans le cadre de la prise en charge d’une aménorrhée primaire causée par une hyperprolactinémie par exemple, la bromocriptine est utilisée. Elle est très efficace et assure la baisse du taux de prolactine au bout de quelques jours de traitements. Elle permet au patient d’avoir ses règles et de développer ses caractères sexuels secondaires.

Traitement chirurgical

Le traitement chirurgical est utilisé en dernier recours pour traiter l’aménorrhée primaire. Il est indiqué lorsque les étiologies de l’aménorrhée primaires sont graves et ne peuvent être contrôlées par les traitements précédents. En général, l’intervention chirurgicale est planifiée et menée par une équipe composée de plusieurs professionnels de la santé. Par exemple, un chirurgien, un anesthésiste, un gynécologue, une infirmière, etc. La durée de l’intervention varie en fonction de sa complexité et le pronostic vital n’est généralement pas très engagé. Cependant, à l’instar de toute chirurgie, le risque 0 n’existe pas.

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