Santé

THS : bénéfices, risques et recommandations de l’Afssaps 

Le traitement hormonal substitutif de la ménopause (THS ou THM) est une approche médicamenteuse qui aide à soulager les symptômes climatiques de la ménopause. Depuis 2000, son usage a fait l’objet de nombreuses controverses, suite à un certain nombre d’études internationales qui contredisaient certaines indications. Au regard de ces différentes études, les autorités sanitaires françaises, notamment l’ANSM (anciennement AFSSAPS) a publié plusieurs mises au point et recommandations sur le THS. Lesquelles ? Quelles sont les études randomisées réalisées ? Quels sont les bénéfices et les risques de ce traitement ? Voici des éléments de réponses !

Traitement hormonal substitutif : description

Le traitement hormonal substitutif, comme son nom l’indique, consiste en l’administration d’une série de médicaments qui remplacent la fonction endocrine de l’ovaire. Ces substances sont des œstrogènes et des progestatifs. Toutefois, la plus importante est l’œstrogène dont la carence donne lieu à tous les symptômes caractéristiques de la ménopause.

Quant aux progestatifs, ils peuvent agir sur un symptôme particulier du complexe climatérique ou contribuer au maintien de la masse navale. Il est courant de les administrer essentiellement pour contrecarrer l’effet prolifératif des œstrogènes sur l’endomètre et ainsi prévenir le cancer de l’endomètre.

Les indications

D’une manière générale, le THS permet de traiter toutes les femmes qui se trouvent dans la période dite « climatère ». Il vise également celles en ménopause précoce ainsi que celles qui présentent un risque de développer les maladies cardiovasculaires et l’ostéoporose. Ces dernières années cependant, le THS a connu d’importantes variations dans les critères suivis pour ses indications et contre-indications. Il est devenu beaucoup plus restrictif dans le sens où il existe actuellement un accord majoritaire prônant son utilisation chez certaines femmes.

Les contre-indications

Aujourd’hui, on peut affirmer qu’il n’y a pas réellement de contre-indication absolue à l’administration d’un THS d’application générale. Néanmoins, l’antécédent de cancer du sein reste la principale contre-indication, quand bien même les preuves sont insuffisantes. Il est évident que les cas doivent être soigneusement définis et sélectionnés.

Les formes d’administration disponibles

Les formes d’administration du THS sont essentiellement orales et parentérales : transdermique, percutanée et intravaginale.

Voie orale

Lorsqu’on administre des œstrogènes oraux, il faut tenir compte du fait que leur passage dans le foie entraînera certains changements. Ils sont absorbés par la paroi intestinale et pénètrent dans le foie par le système porte avant de se retrouver dans la circulation sanguine générale. Pour permettre un soulagement symptomatique, les doses orales doivent être supérieures à celles administrées par voie parentérale.

Voie parentérale

L’administration transdermique ou percutanée des œstrogènes ou progestatifs a moins d’effet sur le foie lorsque la dose est équivalente à celle prise par voie orale. Les médicaments peuvent être sous forme de patchs cutanés, de gel ou de vaporisateur. Par ailleurs, l’absorption vaginale des œstrogènes est généralement indiquée chez les femmes qui présentent des symptômes urogénitaux « isolés ». Cette voie d’administration peut être efficace dans les traitements systémiques de progestérone naturelle micronisée.

Traitement hormonal substitutif : études réalisées

Le THS a fait l’objet de nombreuses discussions et spéculations depuis les années 1960. Une série d’études ont été alors menées pour la prévention du risque cardiovasculaire chez les femmes en ménopause. Il s’agit de :

  • L’étude observationnelle PEPI (Postmenopausal Estrogen/Progestin Interventions),
  • L’étude observationnelle NHS (Nurses Health Study),
  • Les études HERS I et II (Heart and Estrogen/progestin Replacement Study),
  • L’étude WHI (Women’s Health Initiative),
  • L’étude épidémiologique MWS (MillionWomen Study),
  • L’étude française E3N (Étude épidémiologique de femmes de la Mutuelle générale de l’Éducation nationale),
  • L’étude ESTHER (EStrogens THromboEmbolism Risk).

L’étude observationnelle PEPI (Postmenopausal Estrogen/Progestin Interventions)

Publiée en 1995, cette enquête multicentrique a été développée comme une étude prospective, randomisée et en double aveugle. Elle a été contrôlée par placebo avec 875 femmes ménopausées en bonne santé qui étaient âgées de 45 à 64 ans. Ces dernières ont été suivies pendant trois ans. Au terme de l’étude, il a été conclu que les œstrogènes conjugués équins (CEE) oraux provoquent des diminutions du cholestérol total et LDL. Ce constat a été fait même lorsqu’ils sont pris seuls ou ont été associés à la progestérone micronisée ou à l’acétate de médroxyprogestérone. De manière continue ou séquentielle, ils entrainaient aussi :

  • Des diminutions du cholestérol total et du LDL,
  • Des augmentations du HDL,
  • De légères augmentations des triglycérides.

Cela se situerait au niveau des effets des hypolipémiants dans la prévention des maladies cardiovasculaires. Ces œstrogènes agissaient alors sur la paroi vasculaire et modifiaient la formation de la plaque d’athérosclérose.

L’étude observationnelle NHS (Nurses Health Study)

Elle a été réalisée après l’étude PEPI. La NHS est une étude de cohorte prospective et observationnelle qui a rassemblé 70 553 infirmières ménopausées aux États-Unis. Elle a pu confirmer les avantages du THS dans la prévention primaire des maladies cardiovasculaires chez les femmes en ménopause. L’objectif était d’étudier la durée, la dose et le type de thérapie, et la corrélation entre ce traitement et la prévention primaire de ces affections. Il a été conclu que les femmes qui suivaient un THS avaient moins d’événements coronariens majeurs (dans 39 % des cas).

La cohérence entre les études observationnelles a conduit à la formulation d’une hypothèse cardioprotectrice des œstrogènes. Elle a pu être d’actualité jusqu’aux années 1990, après qu’une série d’essais contrôlés randomisés ont été menés. D’autres études ultérieures ont néanmoins remis en cause l’opinion retenue jusqu’alors, puisque les résultats ne valident pas les résultats décrits dans les études observationnelles.

Les études HERS I et II (Heart and Estrogen/progestin Replacement Study)

Débutés en 1996, les HERS sont des essais randomisés, en double aveugle et contrôlés par placebo. L’objectif était de déterminer l’effet du THS, avec le β-œstradiol (E2) + progestatif, dans la prévention secondaire des maladies cardiovasculaires. L’étude HERS I a rassemblé 2 763 participantes. Ces femmes ménopausées étaient réparties aléatoirement entre les deux groupes d’étude et avaient entre 44 et 79 ans (en moyenne 67 ans).

Par ailleurs, ces participantes étaient en ménopause et avaient toujours leur utérus ainsi qu’une maladie cardiovasculaire. Elles ont reçu 0,625 mg d’E2 conjugué plus 2,5 mg d’acétate de médroxyprogestérone ou un placebo. De plus, elles ont été suivies pendant 4,1 ans. Au cours de l’analyse des données, il a été conclu qu’il n’y avait pas de différences significatives entre les deux groupes. Par conséquent, il n’est pas possible d’utiliser le THS dans la prévention secondaire des maladies cardiovasculaires.

Une deuxième étude de phase (HERS II) a été menée. Au cours de cet essai, les mêmes femmes ont été suivies pendant 2,7 années supplémentaires. Au terme de cette période, les résultats de la première étude ont été confirmés. Autrement dit, un traitement plus long par THS n’a pas réduit le risque d’événements coronariens chez les femmes atteintes de maladies cardiovasculaires.

Les études WHI (Women’s Health Initiative)

Les études de WHI ont été publiées entre 2002 et 2006. Elles sont des essais multicentriques randomisés en double aveugle, rassemblant 27 347 femmes ménopausées âgées de 50 à 79 ans. Celles-ci ont été recensées de 1993 à 1998 dans 40 centres cliniques aux États-Unis. La première a rassemblé 16 608 femmes avec un utérus qui ont été randomisées pour recevoir quotidiennement des CEE oraux (0,625 mg). En plus, elles ont reçu de l’acétate de medroxyprogesterone (2,5 mg) ou un placebo.

La seconde a regroupé 10 739 femmes hystérectomisées (sans utérus) ont été randomisées pour recevoir 0,625 mg de CEE oraux seuls ou un placebo. L’essai a été conçu pour durer 8,5 ans, mais le National Heart, Lung and Blood Institute (NHLBI) a décidé de l’arrêter à 5,2 ans. En effet, on a noté des risques accrus de cancer du sein et d’autres problèmes de santé. De plus, les risques du traitement hormonal substitutif l’emportaient sur les avantages.

D’après les résultats, les chercheurs ont pu observer un risque élevé de cancer du sein invasif, une augmentation des événements coronariens par rapport au placebo. On a également noté une augmentation des phénomènes emboliques (22 %) et des accidents vasculaires cérébraux (41 %). La plupart des cas n’étant pas mortels, aucune différence dans la mortalité due aux maladies cardiovasculaires n’a été observée.

Utilisation des CEE

Chez les patientes qui déjà subi une hystérectomie, on a conclu que l’utilisation d’E2 équin conjugué augmente le risque d’accident vasculaire cérébral. Elle diminue le risque de fracture de la hanche, n’affecte pas les maladies coronariennes et peut réduire le risque de cancer de sein. Le document final sur l’E2 a conclu qu’il pourrait y avoir un effet protecteur chez les femmes âgées de 50 à 59 ans. Seul, l’E2 n’augmente pas le risque du cancer du sein. Toutefois, on a noté une augmentation précoce de la thrombose veineuse.

En raison de l’impact des résultats de cette étude, plusieurs analyses et critiques ont été réalisées par la suite. Celles-ci avaient un rapport avec les caractéristiques de la population étudiée, la méthode et l’analyse des données.

Utilisation combinée d’E2 et de progestatifs

En 2006, un chercheur a réévalué l’étude en analysant les graphiques de données tabulées. Il a obtenu des résultats différents, concluant que le traitement des femmes ménopausées avec E2 et progestatif n’augmente pas les risques de :

  • Maladies cardiovasculaires (ou d’accident vasculaire cérébral)
  • Cancer du sein invasif,
  • Thromboembolie veineuse.

Une autre limitation de l’étude est qu’elle n’a testé qu’un seul schéma thérapeutique, de sorte que les résultats ne s’appliquent pas aux doses inférieures. De même, ils n’ont pas pris en compte les autres formulations orales ou transdermiques d’E2 et de progestatifs, ou à l’E2 et aux progestatifs administrés par voie transdermique.

Dans cette ligne de pensée, l’attention s’est concentrée sur la prévention primaire des maladies cardiovasculaires chez les femmes récemment ménopausées. Ainsi, l’hypothèse de la fenêtre critique de l’hormonothérapie a émergé. Celle-ci soutient que le THM pourrait être efficace si on le commence tôt. Afin d’évaluer cette hypothèse, les spécialistes ont réalisé des études ultérieures.

L’étude épidémiologique MWS (Million Women Study)

C’est un essai qui a été mené au Royaume-Uni. Il a regroupé 1 084 110 femmes âgées de 50 à 64 ans. Elles ont reçu des traitements hormonaux substitutifs de la ménopause. L’étude a confirmé qu’il y a effectivement un risque de cancer de sein associé à ces traitements. Il convient de noter que cela concerne les femmes européennes, peu importe le type de THM qu’elles ont reçu.

L’étude française E3N (Étude épidémiologique de femmes de la Mutuelle générale de l’Éducation nationale)

L’étude française E3N ou encore « Étude épidémiologique auprès des femmes de l’Éducation nationale » a rassemblé 100 000 femmes de la mutuelle générale de l’éducation nationale (MGEN). Elle a rapporté un risque de cancer du sein qui avoisine celui des femmes qui ne sont pas sous THS.

L’étude ESTHER (EStrogens THromboEmbolism Risk).

L’étude ESTHER s’est déroulée en 1998 afin d’évaluer le risque de la voie d’administration des œstrogènes sur la coagulation sanguine chez les femmes ménopausées. Évidemment, ces dernières utilisent un THM. Il y aurait une hypercoagulabilité en raison des œstrogènes par voie orale et une neutralité ceux administrés par voie transdermique. Les résultats ont permis de conclure qu’il n’y a pas de risque de thromboembolique induit par les œstrogènes par voie transdermique.

Traitement hormonal substitutif : bénéfices et risques notés à l’issue des études

Le traitement hormonal substitutif de la ménopause (THS ou THM)

Les résultats des études précédentes ont montré les risques et les bénéfices de l’utilisation d’un THS à base d’œstrogènes conjugués équins oraux et d’acétate de médroxyprogestérone.

Les bénéfices

D’après ces résultats, le traitement hormonal serait efficace dans le traitement des troubles qui surviennent pendant cette phase de la vie des femmes. Il s’agit notamment des :

  • Bouffées de chaleurs,
  • Troubles génitaux et urinaires,
  • Sueurs nocturnes.

De même, ce traitement s’est avéré efficace dans la prévention des fractures du col du fémur et de l’ostéoporose. En revanche, l’effet contraire a été noté dans celle des maladies cardiovasculaires ou coronaires.

Les risques

Les études ont permis d’évaluer plusieurs risques associés au traitement hormonal de la ménopause. On peut notamment citer le risque de la thrombose veineuse qui peut à long terme se compliquer en embolie pulmonaire. Par ailleurs, il y aurait un risque accru de cancer du sein, mais qui serait associé plutôt à la durée du traitement. Autrement dit, il augmente avec l’âge. Les autres risques notés sont entre autres :

  • Survenue d’événements coronariens surtout un an après le début du traitement,
  • Survenue d’accidents vasculaires cérébraux,
  • Survenue de cancer de l’ovaire.

Tous ces risques sont principalement associés à une prise de THM à base de CEE et de MPA.

Traitement hormonal substitutif : recommandations des autorités sanitaires françaises

Au regard des résultats des études susmentionnées, les autorités françaises ont publié des mises au point. Celles-ci ont restreint les indications du THS, énuméré des contre-indications et ont permis de faire des recommandations pour un bon usage du traitement.

Les nouvelles indications

Ces indications ont été restreintes aux différents troubles notés dans la période dite de climatère. Le traitement ne peut être instauré que s’ils altèrent la qualité de vie des patientes. Aussi, si ces dernières le souhaitent, le spécialiste peut prescrire un THS à une dose thérapeutique (la plus faible, mais efficace). Les patientes doivent alors le suivre pendant une très courte durée. Par ailleurs, le praticien devra effectuer une réévaluation régulière du THS (une fois l’année) tout en tenant compte du rapport bénéfice sur risque.

En outre, le traitement de la ménopause est restreint chez les femmes qui présentent un risque non négligeable de fracture. Elles ne doivent recevoir un traitement hormonal qu’en cas d’intolérance à d’autres traitements alternatifs. Ceux-ci sont principalement recommandés pour la prévention de l’ostéoporose. Il convient de noter que leurs médecins doivent évaluer avec elles les rapports bénéfices sur risques.

Les contre-indications

Les nouvelles contre-indications du traitement hormonal substitutif concernent les femmes ménopausées qui présentent un cancer du sein (ou suspecté). De même, elles doivent        avoir été diagnostiquées pour des tumeurs dépendantes des œstrogènes comme le cancer de l’endomètre. De plus, les patientes qui souffrent d’événements thrombo-emboliques veineux ou qui ont des antécédents de maladies thrombo-emboliques ne doivent pas utiliser le THS.

D’une part, ce traitement est également déconseillé dans les situations suivantes :

  • Les patientes présentent une hémorragie génitale ou des accidents thrombo-emboliques des artères en évolution ou récents.
  • Les victimes ont développé des anomalies comme les carences en protéines (S, C ou antithrombine).
  • Les patientes présentent des antécédents de maladies coronaires ou de syndrome coronarien aigu ainsi que des affections hépatiques (aiguës ou chroniques).
  • Les patientes ont un risque accru de développer des maladies cardiovasculaires ou présentent une porphyrie.

Elles doivent informer leur médecin pour un arrêt du traitement lorsqu’elles présenteront des symptômes graves. Ceux-ci sont : altération de la fonction du foie, ictère ou jaunisse, migraines récurrentes. Enfin, les femmes qui ont subi une ablation de l’utérus ne doivent pas utiliser un THS avec combinaison d’œstrogènes et de progestatifs. Elles doivent seulement prendre des œstrogènes. Les facteurs de risques des maladies cardiovasculaires ne représentent pas des contre-indications en matière de THS.

Les recommandations pour un bon usage du traitement

Avant d’instaurer un traitement hormonal substitutif, les spécialistes doivent présenter aux patientes toutes les informations utiles. Ainsi, il faudra prescrire un THS adapté à chaque cas individuellement, tout en évoquant les risques ainsi que les bénéfices. Les victimes doivent alors connaitre les résultats des différentes études réalisées afin de mieux décider de ce qui leur convient le mieux.

Par ailleurs, ces femmes en ménopause doivent régulièrement subir un examen médical complet qui inclut l’examen gynécologique, celui des seins (échographie, palpation, mammographie). Cela va permettre de déterminer le traitement adéquat au fil du temps. De plus, il est nécessaire de faire une analyse des différents antécédents familiaux de ces victimes.

En outre, les professionnels de santé doivent surveiller de façon régulière les différents risques de maladies cardiovasculaires. Pour cela, il faudra rechercher les facteurs de risques, des traitements hypolipémiants, antidiabétiques ou anti-hypertenseurs. Il faut insister sur la recherche des antécédents cardiovasculaires.

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