Santé

Arthrite Chronique Juvénile (ACJ) : symptômes, diagnostic et traitement

L’arthrite chronique juvénile (ACJ), encore connue sous l’appellation d’AJI (Arthrite Juvénile Idiopathique), est une maladie inflammatoire des articulations chez les enfants de moins de 16 ans. Cette pathologie rare et méconnue existe sous diverses formes avec des symptômes dangereux pour la croissance des patients.

Malheureusement, il n’existe pas de cause définie de cette maladie, ce qui rend son traitement le plus souvent imprécis. Quelles approches peut-on alors adopter face à ce mal ? L’arthrite chronique juvénile peut-elle être soignée efficacement ? Voici tout ce qu’il faut savoir sur le sujet.

ACJ : Généralités

L’arthrite chronique juvénile est une malade extrêmement rare, mais qui touche davantage les jeunes filles que les jeunes garçons. En effet, sur 100 000 enfants de moins de 16 ans, environ 8 à 12 garçons sont atteints par la maladie. Ces chiffres sont multipliés par deux chez les jeunes filles.

Tous les âges en dessous de 16 ans peuvent contracter cette maladie sans qu’on ne puisse tirer une théorie concrète de la cause du mal. On note cependant un pic d’occurrence de l’ACJ à des périodes précises de l’enfance notamment :

  • Entre 18 mois et 5 ans
  • Entre 9 et 14 ans.

Par ailleurs, certaines formes de la maladie perdurent à l’âge adulte.

ACJ : symptômes, formes et complications

Les signes de la maladie dépendent de la forme contractée. Cependant, on reconnait des caractéristiques générales concernant toutes les occurrences. Il s’agit de :

  • Douleurs au niveau des articulations (genoux, poignets, pieds, hanches, coudes, doigts…)
  • Sensation localisée de chaleur
  • Gonflement articulaire
  • Limitation des mouvements possibles (rotations, supinations…).

Plus spécifiquement, on recensera des signes spécifiques à chaque forme de la maladie.

Formes

L’arthrite chronique juvénile existe sous une multitude de formes. On distingue notamment les arthrites enthésites (spondylarthropathies), le rhumatisme psoriasique, la polyarthrite systémique, l’oligoarthrite juvénile, la polyarthrite avec ou sans facteur rhumatoïde, etc. En fonction des signes associés à chaque forme, trois grandes catégories peuvent servir d’illustration. Il s’agit de :

  • La forme systémique
  • La forme oligoarticulaire
  • La forme polyarticulaire

La forme systémique

La polyarthrite systémique anciennement appelée maladie de Still représente 20 % des cas de survenance de la maladie. Elle atteint aussi bien la fille que le garçon suivant une fréquence plus importante chez la fille. On note néanmoins un pic d’occurrence entre 2 et 7 ans pour les deux profils. Ici, les symptômes sont plus d’ordre général qu’articulaire. On distingue :

  • Une fièvre prolongée sur plus de deux semaines
  • Des convulsions, une somnolence
  • Une éruption de type maculaire, fugace à divers points du corps
  • Des myalgies et des arthralgies (chevilles, genoux, poignets)
  • Une grosseur du foie et de la rate
  • Une inflammation de la plèvre (membrane autour des poumons)
  • Douleurs abdominales liées à une atteinte péritonéale
  • Atteinte du rachis cervical manifestée par une compression médullaire
  • Atteinte des séreuses (péricardite essentiellement), le plus souvent au cours de l’évolution
  • Des atteintes articulaires notamment au niveau de la hanche pouvant conduire à l’invalidité

Cette forme de la maladie peut causer beaucoup de souffrance au patient. Il existe toutefois une possibilité de guérison totale ou le cas échéant, des périodes de rémission.

La forme oligoarticulaire

Cette forme représente 50 % des cas de survenance de la maladie. Elle affecte essentiellement les filles et touche au maximum 4 articulations (genoux, cheville, hanche, poignet). Les signes associés à ce mal sont :

  • Des arthralgies simples avec des articulations enraidies au matin
  • Une rétraction progressive des tendons fléchisseurs aboutissant à une attitude en griffe sans douleur des doigts, des rétractions tendineuses
  • Une fonte des muscles (amyotrophie)
  • Un gonflement du dos de la main (tumeur dorsale de la carpe)
  • Une arthrite de la hanche
  • Un torticolis douloureux
  • Une limitation de l’ouverture de la bouche
  • Des nodules sous la peau au niveau du cubitus de la colonne vertébrale, etc.

Il faut noter l’absence de fièvre et d’éruption cutanée au niveau de cette forme d’ACJ. Il existe cependant un risque d’atteintes oculaires comme une iridocyclite avec un début insidieux. En l’absence de traitement précoce, la baisse de l’acuité visuelle aboutit à des complications (cataracte, kératite, cécité).

La forme polyarticulaire

Les ACJ de formes polyarticulaires regroupent les atteintes initiales de plus de 4 articulations sans signe systémique. Elles représentent 30 % des cas d’occurrence de la maladie et touchent essentiellement les filles dans la tranche de 10 à 15 ans. On note entre autres signes :

  • des atteintes symétriques,
  • des lésions aux grosses articulations,
  • un œdème, de la douleur et une limitation des mouvements articulaires.
  • Un enraidissement matinal des muscles, etc.

Cette forme se rapproche de la polyarthrite rhumatoïde.

Évolution et complications

L’ACJ évolue généralement en trois étapes. Pour commencer, on note une inflammation de la synoviale articulaire sans atteinte osseuse. Cette synovite altère la capsule et les ligaments et l’articulation se place en mauvaise position. Ensuite, on recensera une diminution des capacités articulaires du patient ; une limitation des mouvements ainsi qu’une perte de stabilité.

L’atteinte musculaire pourra évoluer vers l’atrophie des muscles selon que la douleur et l’inflammation des tendons s’intensifient. Les évolutions et les complications possibles de maladie sont variées et imprévisibles. Il peut s’agit de :

  • retard de croissance,
  • inégalité des membres,
  • destructions précoces des articulations,
  • uvéites,
  • cécité à long terme,
  • douleurs chroniques,
  • troubles psychologiques,
  • atteinte cardiaque,
  • insuffisance rénale, progressive
  • absentéisme scolaire, etc.

Le risque de décès existe dans l’ordre de 3 à 8 % des cas. Cette statistique témoigne de la dangerosité de l’ACJ. Il faut dire que la maladie est très capricieuse, car certains patients vont guérir totalement après quelques années de traitement. D’autres ne connaitront jamais la rémission totale pendant que d’autres encore rechuteront après des années de guérison. Un diagnostic établi à temps permettra d’éviter une grande partie de ces complications.

ACJ : Diagnostic

Arthrite Chronique Juvénile (ACJ)

Le diagnostic de l’arthrite chronique juvénile est essentiellement clinique. Une arthrite de plus de 6 semaines avant l’âge de 16 ans (avec quelques symptômes évocateurs) fait suspecter la maladie. Les conclusions ne s’établissent qu’après élimination des causes infectieuses et tumorales. Il faudra essentiellement examiner la peau et les yeux à la recherche d’une maladie de système.

Aussi, on utilisera l’imagerie pour évaluer les articulations difficilement examinables ; l’objectif étant de différencier les destructions articulaires des atteintes actives. En réalité, le recours à l’IRM se justifie par la difficulté d’interprétation via échographie (par rapport à l’âge de l’enfant).

Sur le plan de la biologie, il n’existe pas de signes spécifiques aux ACJ de forme systémique. Pour les autres cas, on pourra citer l’augmentation de la vitesse de sédimentation, l’anémie hypochrome, l’hyperleucocytose, etc. Il faudra aussi distinguer deux formes de la maladie : la forme séronégative de celle séropositive.

Commençant par la forme séronégative, elle est moins sévère et finit par s’éteindre sans laisser de grandes gênes articulaires. Quant à la deuxième forme (séropositive), elle est plus préoccupante, car pouvant aboutir à une destruction progressive des articulations. La distinction des deux formes passe par le dosage des facteurs rhumatoïdes (présence à 20 %) ; un examen réservé aux enfants de plus de 8 ans.

Le diagnostic différentiel

Pour ce qui est du diagnostic différentiel, il existe une multitude de pièges liée au polymorphisme de la maladie ainsi qu’à l’absence de signes spécifiques des affections. Il faudra donc écarter les possibilités de :

  • A.A. (rhumatisme articulaire aigu)
  • Sclérodermie
  • Lupus érythémateux disséminé (L.E.D.)
  • Arthrite purulente
  • Septicémie
  • Purpura rhumatoïde
  • Ostéomyélite
  • Leucémie
  • Drépanocytose
  • Sarcoïdose
  • Maladie de Perthes
  • Agammaglobulinémie
  • Colite ulcéreuse
  • Traumatisme articulaire
  • Hémophilie
  • Spondylarthrite ankylosante
  • Maladie d’Osgood-Shclatter
  • Iléite régionale
  • Epiphysiolyse fémorale
  • Dermatomyosite
  • A.N. (périartérite noueuse), etc.

Précisons que le R.A.A. apparait comme le plus grand piège de ce diagnostic. Il faudra se montrer attentif aux fluxions qui sont plus rouges et chaudes. Elles peuvent en outre migrer.

ACJ : Traitement

Le traitement de l’arthrite chronique juvénile peut faire intervenir plusieurs spécialistes qu’il s’agisse de kinésithérapeute, de pédiatre, de rhumatologue, de chirurgien orthopédiste, radiologue, psychologue, etc. L’hospitalisation n’étant pas nécessaire (sauf cas extrêmes), le mode de vie en famille sera aussi un facteur déterminant de la guérison.

L’adaptation du cadre de vie

Avant de parler de traitement médicamenteux ou d’intervention de spécialistes, il semble judicieux de préciser la place du mode de vie dans le traitement. En réalité, il faudra que l’enfant et son entourage intègrent naturellement les solutions à leur quotidien pour une rémission facilitée. Les parents doivent laisser l’enfant s’autonomiser par la réalisation de tâches normales (s’habiller, faire sa toilette, manger sans aide). Leur rôle en cas d’enraidissement majeur des articulations sera de modifier l’environnement au mieux pour simplifier les activités de l’enfant.

L’enfant doit pouvoir réaliser des activités physiques sans restrictions (en réalité, il se limitera lui-même en raison de la douleur, de la gêne ou de la fatigue). Il faut donc le laisser jouer autant qu’il peut et l’encourager à accepter les traitements médicamenteux. Une discussion sur les effets positifs des médicaments est recommandée. Aussi, il est préférable d’informer les autorités (l’enseignant et l’administration) à l’école de l’enfant afin que celles-ci accompagnent les efforts d’une fréquentation normale.

Enfin, il n’est pas nécessaire d’appliquer un régime alimentaire spécifique à l’enfant. Il suffit d’éviter qu’il prenne trop de poids ou devienne obèse. Justement, la surcharge pondérale constitue un facteur favorisant la destruction des cartilages articulaires.

Traitements médicamenteux

Le traitement qu’il soit médicamenteux ou non doit être déterminé avec l’avis du pédiatre qui tient compte d’un certain nombre de facteurs. Habituellement, il s’agira en première intention d’utiliser des antalgiques. Dans ce cadre, l’aspirine est le médicament de prédilection en raison de ses propriétés anti-inflammatoires et antalgiques de grande efficacité. Il sera suppléé par d’autres anti-inflammatoires non stéroïdiens dont les effets seront observables après 1 à 3 mois d’application correcte.

Lorsque les médicaments de première intention ne résolvent pas le problème, une deuxième vague de traitement médicamenteux est utilisée. Il s’agit de substances de fond telles que la D-pénicillamine, les sels d’or, le méthotrexate, etc. Leur efficacité ne peut se mesurer qu’après 3 à 6 mois de traitement. L’emploi de corticoïdes ne sera nécessaire que si l’aspirine se révèle efficace dans son rôle d’antalgique.

Traitement local

Les médicaments administrables par voie orale peuvent aussi se révéler insuffisants pour contrer la pathologie. Dans ces cas, les corticoïdes seront directement injectés dans l’articulation inflammatoire. En cas de persistance des signes d’inflammation, le médecin peut procéder à deux ou trois infiltrations. Une destruction locale de la synoviale inflammatoire peut aussi devenir nécessaire par l’utilisation d’acide osmique.

Traitements non médicamenteux

Les traitements non médicamenteux regroupent la chirurgie ainsi que la kinésithérapie.

La chirurgie

Diverses opérations entrent dans le cadre du traitement chirurgical de l’ACJ. Elles peuvent être curatives ou palliatives. On distingue :

  • L’arthroscopie
  • La synovectomie
  • Ténotomie
  • Ostéotomies
  • Arthrodèse
  • Arthroplastie

L’arthroscopie

Il s’agit de réaliser plusieurs minuscules incisions afin de visualiser l’intérieur d’articulations inflammatoires avec une minicaméra ; l’objectif final étant de réaliser un lavage articulaire. Celui-ci permettra d’éliminer de nombreux débris intra-auriculaires qui nuisent au traitement local.

La synovectomie

Il s’agit d’une ablation chirurgicale de la synoviale au niveau de l’articulation atteinte. Elle sera accompagnée d’une rééducation postopératoire.

La ténotomie

Cette chirurgie consiste à couper partiellement ou totalement les tendons qui se sont rétractés autour des articulations.

L’ostéotomie

Il s’agit d’une coupe du tibia pour corriger les détaxations des articulations.

L’arthroplastie

Elle consiste à rétablir la mobilité de l’articulation par la création d’un nouvel espace articulaire. On pourra utiliser les prothèses chez l’enfant.

La kinésithérapie

La kinésithérapie permet de limiter les réactions tendineuses, l’ankylose des articulations, les déformations… Il s’agit d’une rééducation des articulations par des techniques de massage, de kinésithérapie active, l’utilisation d’attelles amovibles, l’hydrothérapie, etc. Le patient devra veiller à prendre des positions de sommeil correctes pour le maintien en bon état des articulations. Éviter les oreillers et se coucher sur le ventre peuvent constituer des indications du spécialiste.

Par ailleurs, une psychothérapie peut être incontournable pour rassurer l’enfant et préserver son avenir. En effet, la plupart des malades atteindront l’âge adulte sans invalidité majeure. Il importe donc de les mettre en confiance afin d’éviter des complications psychologiques.

 

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