Santé

Apoptose : causes, rôles, déroulement et conséquences

L’apoptose encore appelée « mort cellulaire programmée » constitue un phénomène physiologique à travers lequel des cellules de l’organisme déclenchent leur autodestruction suite à un signal spécifique. Ce processus tout à fait naturel est indispensable à la survie des organismes multicellulaires. Justement, il est en équilibre avec la multiplication des cellules.

Cependant, la mort cellulaire programmée peut connaitre des dysfonctionnements de divers ordres. Ceux-ci peuvent induire des répercussions graves sur la santé des personnes atteintes. À quoi sert concrètement l’apoptose ? Quelles sont les conséquences associées à son blocage ou son accélération ? Voici tout ce qu’il faut savoir sur le sujet.

Apoptose : Causes

Les cellules eucaryotes, contrairement aux bactéries ainsi qu’aux cellules cancéreuses, ne se prolifèrent pas de manière illimitée. En effet, elles s’éteignent au bout d’un seuil maximal de multiplications (70 par culture cellulaire). Cette mort programmée constitue un processus normal dans l’organisme humain.

Les facteurs qui permettent le déclenchement du phénomène sont de divers ordres. On note :

  • La perte d’interaction avec le corps, d’autres cellules ou encore la matrice extracellulaire (une cellule normale doit se faire confirmer son utilité à l’organisme par diverses sollicitations notamment les facteurs de croissance… Lorsque ces échanges s’interrompent, l’apoptose peut se déclencher).
  • Les signaux hormonaux (une régulation du système immunitaire peut nécessiter l’apoptose de certaines cellules. Ceci se fera par l’émission de signaux hormonaux tels les glucocorticoïdes).
  • Les signes d’un dommage subi par l’ADN (l’apoptose peut se déclencher lorsque l’organisme signale une atteinte de l’ADN suite à une irradiation aux rayons UV par exemple. Ce dommage pouvant entrainer le cancer ou le dysfonctionnement des cellules, la mort cellulaire permettra d’éviter les complications).
  • La dégradation des télomères des chromosomes

Il va sans dire que la survenance d’apoptoses s’effectue généralement pour une certaine utilité dans l’organisme de la personne.

Apoptose : rôles

Il ne s’agira évidemment pas d’énumérer toutes les utilités du phénomène dans l’organisme. Quelques exemples phares permettront d’illustrer l’importance de l’apoptose.

La morphogenèse

L’apoptose est essentielle à la formation du corps d’un organisme

. Par exemple, pour l’émergence des doigts, la main qui originellement ressemblait à un moufle, se transformera par la mort cellulaire programmée. En effet, les cellules se trouvant entre les futurs doigts vont disparaitre pour permettre le développement.

De même, dans d’autres phénomènes notables comme la formation du cerveau, on retrouve l’apoptose. Déjà lors de l’embryogenèse, le remodelage du cerveau s’effectuera grâce à l’élimination d’une vague de cellules. Ensuite, les neurones vont former des liaisons utiles entre eux, avant que d’autres apoptoses n’éliminent les cellules inutiles.

La régulation du système immunitaire

Pour réguler la défense immunitaire, l’apoptose sera encore présente. En effet, lorsqu’un antigène étranger apparait dans l’organisme, des lymphocytes B s’attisent à la production d’anticorps particulier (recombinaison VDJ) en guise de réponse. Certains anticorps produits peuvent être inactifs ou auto-immuns. Dans ces cas, la mort cellulaire programmée intervient pour éliminer les lymphocytes à l’origine de ce dysfonctionnement.

En outre, lorsque l’organisme est atteint d’une infection virale, les lymphocytes T cytotoxiques produisent des substances toxiques afin de détruire les cellules infectées. Dès que l’infection est maitrisée, il importe que ces lymphocytes soient détruits pour éviter des effets indésirables. Ce mode de fonctionnement peut cependant entrainer d’autres mécanismes néfastes comme le défaut de sécrétion d’interleukines dans le contexte du VIH.

La différenciation intestinale

La mort cellulaire programmée est encore utile lors du renouvellement des cellules intestinales. En effet, ces cellules doivent se renouveler et migrer vers le sommet des villosités intestinales afin d’assurer la fonction d’absorption des nutriments. En mécanisme ultime de cette opération, l’apoptose sous sa forme d’anoïkose se déclenche pour permettre la reprise du processus.

Apoptose : déroulement

Apoptose

Les scénarios de l’apoptose sont variés. De manière générale, elle se déroule sur des cellules non regroupées suivant diverses étapes. Avant d’aborder celles-ci, il importe de différencier l’apoptose d’une autre forme de mort cellulaire spécifique dénommée nécrose. En effet, la nécrose constitue une destruction prématurée et non programmée de cellules. Elle est due à des dommages physiques ou chimiques qui fragilisent les cellules. Une forte réponse inflammatoire caractérise ce processus.

En ce qui concerne les étapes de manifestation de l’apoptose, on distingue essentiellement :

  • Une purge de la membrane apoptotique
  • La formation de saillies membranaires apoptotiques
  • La fragmentation cellulaire
  • La digestion de l’ADN

Une purge de la membrane apoptotique

Le désassemblage des cellules apoptotiques commence par la purge membranaire. Cette purge apparait le plus souvent sous la forme de petites bulles superficielles à la surface de la cellule. Ces bulles deviendront de grandes bulles selon les stades de l’apoptose afin de faciliter la fragmentation des organites comme le noyau. L’hémorragie des membranes apoptotiques sera régulée par le facteur protéine kinase 1. D’autres facteurs seront associés à cette mission en l’occurrence la famille Rho des petites GTPases.

La formation de saillies membranaires apoptotiques

Au-delà des modifications à la surface de la cellule, d’autres transformations morphologiques seront constatées en vue de générer des saillies diverses. Parmi ces protubérances minces de la membrane, on distingue des pointes de microtubules, des apoptoses en perles, etc. La forme de la saillie dépendra du type de cellule.

On notera par exemple la spécialisation des pointes de microtubules au niveau des cellules épithéliales squameuses apoptotiques. Elles se réalisent pour faciliter la séparation des bulles de membrane puis la distribution du contenu nucléaire dans ces bulles. Sur les cellules T et les fibroblastes apoptotiques, un autre type de saillie appelé « apoptopode pieds de la mort » est observé. Il est moins rigide que les pointes de microtubules, mais peut induire aussi la séparation des bulles de la membrane.

La fragmentation cellulaire

La troisième étape de manifestation de l’apoptose consiste en la fragmentation cellulaire. Il faut dire que ce procédé marque la fin du désassemblage des cellules apoptotiques. Il s’agit concrètement de la libération de corps apoptotiques individuels liés à la membrane. Le mécanisme à la base de cette dissociation n’est pas bien défini, cependant, on recense parfois des nécessités de cisaillement ou d’interaction avec les cellules voisines.

En outre des corps apoptotiques individuels libérés, des vésicules membranaires ayant un diamètre inférieur à 1 micron sont relâchées. Toute l’étape sert à favoriser l’élimination des cellules mortes, car les fragments cellulaires se révèlent plus faciles à engloutir par les cellules phagocytaires.

La digestion de l’ADN

La digestion de l’ADN durant l’apoptose se réalise en fragments de tailles spécifiques (multiples de 180 paires de bases). Elle est assurée par les protéines CAD (Caspase Activated DNase) en association avec une ICAD (Inhibitor of Caspase Activated DNase).

Apoptose : Voies de signalisation

Les voies de l’apoptose conduisent toutes à l’activation de caspases (protéases à cystéine) pour le déclenchement de phénomènes morphologiques et biologiques de destruction de la cellule. Elles sont au nombre de deux notamment :

  • La voie extrinsèque
  • La voie intrinsèque

La voie extrinsèque

La voie extrinsèque de l’apoptose, comme son nom l’indique, se réfère à un signal extérieur à la cellule pour le déclenchement de la mort cellulaire. C’est notamment le cas de la mort cellulaire induite par un lymphocyte T cytotoxique. La cellule immunitaire déclenche l’apoptose par un simple contact de membrane à membrane et l’activation des récepteurs Fas.

La voie intrinsèque

Concernant cette voie, l’apoptose se déclenche par des signaux internes à la cellule. Par exemple, l’activation de p53 (gardienne du génome) lors de dommages importants à l’ADN repose sur ce mécanisme. Elle met en jeu la mitochondrie et est gouvernée par des protéines appartenant à la famille de Bcl-2.

En réalité, l’activation de cette voie se fonde essentiellement sur la formation de pores de transition de perméabilité dans la membrane des mitochondries. Les mitochondries activées connaissent une interaction avec les protéines pour un démantèlement des cellules.

Apoptose : dysfonctionnements et conséquences

Apoptose

Les dysfonctionnements de l’apoptose peuvent se catégoriser en deux groupes auxquels sont associées des conséquences variées. On distingue :

  • Le blocage de l’apoptose
  • L’accélération de l’apoptose

Le blocage de l’apoptose

Le blocage de l’apoptose correspond au ralentissement ou l’arrêt de la mort des cellules. La conséquence la plus connue de cette anomalie s’avère le développement de cellules cancéreuses. Celles-ci ne sont justement plus susceptibles de mourir normalement malgré les signaux de problèmes génétiques recensés au cours de leurs vies.

D’autres maladies aussi peuvent trouver leurs origines dans ce dysfonctionnement de l’apoptose. Il s’agit notamment de pathologies neurodégénératives à l’instar de tauopathies, de l’Alzheimer ou encore de la paralysie supra-nucléaire. Dans ces cas, la protéine tau survit et s’accumule anormalement jusqu’à ce que la cellule nerveuse meure.

Plusieurs approches de traitement sont déjà validées dans le cadre de ce problème. Les causes identifiées se résument le plus souvent à la présence d’une pathologie (comme le HHV8) qui fait obstruction aux récepteurs de mort. On pense ainsi à des médicaments destinés à stimuler l’apoptose.

L’accélération de l’apoptose

L’accélération de l’apoptose peut se décrire comme une activation intempestive du phénomène de mort cellulaire. Ce phénomène de vieillissement prématuré des cellules provoque des conséquences désastreuses pour l’organisme. Le dysfonctionnement a été notamment associé au développement du SIDA, car les lymphocytes responsables de la réponse immunitaire sont rapidement éliminés par l’apoptose.

En réalité, le blocage du VIH par les anticorps des lymphocytes conduit le virus à produire, avant son annihilation totale, une réponse chimique provoquant le suicide massif des lymphocytes. Le virus en voie de destruction s’arrime aux macrophages (chargées d’éliminer les cellules mortes) afin que ceux-ci envoient des signaux de morts aux globules tueurs. Ainsi, la partie des copies du VIH qui a réussi à échapper aux anticorps arrive à mieux s’installer dans l’organisme. Il s’agit d’un détournement du système immunitaire qui s’autodétruit.

D’autres conséquences sont recensées par rapport à cette accélération de la mort cellulaire. En effet, la fragilité du système immunitaire induite par le dysfonctionnement est également source de réactions allergiques auto-entretenues, de maladies dégénératives (pas forcément de nature infectieuse), de réactions exacerbées face à un stress, etc. Les solutions envisagées ici sont purement d’ordre expérimental.

Articles Liés

Bouton retour en haut de la page